Confort d'été, préjugés et solutions
Bref état des lieux et définitions
Le confort d’été vise à limiter la température intérieure même lors d’épisodes caniculaires. On cherche ainsi à réduire le nombre d’heures où la température intérieure dépasse les 26.5 °C. L’isolation thermique est cruciale pour maintenir une température intérieure agréable. La SIA 180: 2014 «Protection thermique, protection contre l’humidité et climat intérieur dans les bâtiments» s’applique pour la vérification complémentaire du confort estival, tout comme les normes SIA 382/1, SIA 342 et SIA 416, ainsi que les cahiers techniques SIA 2024 et 2028. La SIA 180 donne, en complément du niveau d’isolation d’un bâtiment, plusieurs axes de vérification pour le confort estival. Pour justifier le confort thermique, le taux de vitrage ou le coefficient « g» qui déterminent la transmission lumineuse dans le bâtiment sont ainsi à prendre en compte, de même que l’inertie thermique et la ventilation nocturne.
Selon un grand nombre d’experts, il est possible, pour les constructions neuves en Suisse, d’atteindre les objectifs des normes, voire de Minergie qui utilise les données météorologiques projetées dans le futur, sans recourir à la climatisation mécanique que ce soit pour le logement, les écoles ou les bureaux. Il existe en effet de nombreuses solutions à l’échelle du bâtiment mais aussi des techniques de «slow cooling» pour rafraîchir non pas les espaces mais les personnes, lors des épisodes de canicules (ventilateur plafonnier, rafraîchissement adiabatique local ou géocooling).
Vue d’ensemble de la protection thermique estivale
Dans les constructions neuves, le traitement du confort estival relève d’une conception multicritère. Certains facteurs d’influence relèvent du planificateur et d’autres des habitants (par exemple, ouverture des fenêtres la nuit, baisse des protection solaires la journée). On retrouve ces différents facteurs à la figure 2.
Une étude de l’Empa menée en 2008 et synthétisée dans le cahier technique «protection thermique estivale» de l’association Enveloppe des édifices Suisse, permet de répertorier les différentes mesures et de les classifier selon leur pertinence et potentiel d’influence. Ainsi, les critères les plus importants sont (voir figure 3) :
- Minimiser l’apport thermique solaire (isolation de l’enveloppe, protection solaire)
- Maximiser le rafraîchissement nocturne (configuration traversante à privilégier)
- Maximiser la capacité thermique (au moins un élément massif en contact de l’air ambiant, structure, chape voire revêtements).
Orientation, et protection solaire
Pour optimiser le bilan thermique en hiver, on peut augmenter les apports solaires par les vitrages, en créant de plus grandes ouvertures par exemple. Or en période estivale, lorsqu’on cherche à réduire les apports passifs pour ne pas surchauffer les pièces, ces ouvertures vont devenir des points faibles. Il est alors nécessaire de prévoir une protection solaire extérieure au droit des fenêtres, particulièrement sur les façades sud et ouest. Elle peut être assurée par des protections solaires fixes (brise-soleils, auvent, balcon, avant-toit, figure 4), par des vitrages antisolaires (vitrage avec un coefficient de transmission solaire réduit ou vitrage avec une couche réfléchissante), des protections mobiles (store à lamelles orientables, store en toile, volet classique). On veillera aussi à limiter les ouvertures en toiture, très défavorables vis-à-vis de la surchauffe. Il n’existe pas de protection solaire idéale regroupant tous les critères en termes de coût, durabilité, flexibilité, d’efficacité hivernale, d’efficacité estivale, de contrôle de l’éclairage. Il s’agit donc d’étudier les solutions les plus pertinentes sur chaque façade du bâtiment. De plus, l’impact visuel de ces protections influence significativement l’aspect architectural. De même, la conception des parois et du revêtement extérieur doit être adaptée avec l’intégration des caissons de stores extérieurs et de leur raccordement à travers l’enveloppe étanche. L’étude de l’EMPA dont les conclusions sont récapitulées à la figure 3 démontre que les protections solaires peuvent réduire la charge thermique des bâtiments entre 1 et 4°C .
Ventilation nocturne
Le design bioclimatique, qui tire parti des éléments naturels pour réguler la température, joue un rôle crucial dans le confort d’été. Le principe du refroidissement passif en est la meilleure illustration. Cette solution est parfaitement adaptée à nos climats européens où l’on observe une assez grande différence de température entre le jour et la nuit, ainsi qu’une température et une humidité moyenne situées dans la zone de confort.
Tout en réduisant les apports de chaleur externes et internes dans le courant de la journée, on va chercher à évacuer l’excédent de chaleur pendant la nuit en ventilant fortement. Pour garantir l’efficacité de cette méthode, il faut que la température extérieure soit plus basse que la température de confort, ce qui est généralement le cas pendant la nuit. Le type de bâtiment, lourd ou léger, donc son inertie thermique n’a qu’une influence sur la vitesse de refroidissement et pas son ampleur.
Il est en revanche capital que le bâtiment soit isolé de manière adéquate. Ainsi, la quantité de chaleur transmise par l’enveloppe en journée ne dépasse pas ce qu’il est possible d’évacuer pendant la nuit. Ce déphasage est suffisant pour les constructions neuves quelque soit le type d’isolant – dense ou non -. En effet les valeurs d’isolation des normes actuelles (U à 0.17 kW/m2 selon SIA 380/1) assurent cette capacité et le type d’isolant n’influence quasiment pas la température intérieure. La question du déphasage et du choix d’un isolant dense sont par contre beaucoup plus importants en rénovation, quand les épaisseurs que l’on peut effectivement mettre en œuvre sont réduites.
Afin de garantir une ventilation naturelle, il faut respecter des configurations d’ouvertures autorisant un flux d’air suffisant. Idéalement celles-ci sont placées en bas pour la prise d’air frais et en hauteur pour la sortie d’air chaud. En effet, l’air chaud situé au-dessus de l’ouvrant restera piégé sans possibilité d’être évacué pour refroidir la structure (figure 5). L’étude de l’EMPA dont les conclusions sont récapitulées sur le graphique 3 démontre que la présence d’une ventilation nocturne a une influence prépondérante pouvant réduire la température intérieure de 1 à 4.5°C.
Inertie
L’inertie d’une pièce ou d’un bâtiment est sa capacité à absorber et restituer la chaleur ou la fraîcheur, ce qui a pour effet d’amortir les variations de température intérieure. Cette capacité de stockage et déstockage permet notamment d’atténuer les hausses de température intérieure en emmagasinant la chaleur et en la restituant plus tard lorsque la température intérieure diminue.
L’inertie est particulièrement intéressante en termes de confort d’été lorsqu’elle est associée à une ventilation naturelle nocturne (ex: ouverture des fenêtres) quand les températures extérieures ont diminué de manière à évacuer la chaleur stockée en journée. Elle est à distinguer du déphasage d’une paroi qui caractérise la capacité d’une paroi extérieure à ralentir la mise en place du flux de propagation de la chaleur de l’extérieur vers l’intérieur du bâtiment.
Une inertie thermique suffisamment élevée permet de stabiliser la température intérieure. Pour accroître l’efficacité et l’activation de l’inertie thermique potentiellement présente dans le bâtiment, on positionne donc l’isolation thermique à l’extérieur de la masse de stockage.
Cette masse ne peut être simplement ponctuelle, pour être efficace, elle doit au contraire être répartie en surface pour offrir une capacité d’échange maximale. Elle dépend essentiellement de la masse volumique du matériau considéré. Les constructions légères en ossature bois ne présentent donc en soit qu’une faible inertie thermique. Mais, aspect plus important, pour être considérée la masse de stockage ne doit pas être isolée de l’ambiance intérieure.
Les éléments d’enveloppe et d’aménagements considérés doivent donc être apparents ou revêtus d’enduits lourds et conducteurs (plâtre, crépis, carrelage). Les structures massives recouvertes d’un faux-plafond ou de moquette n’auront donc qu’une influence marginale sur l’inertie globale du bâtiment.
L’inertie thermique d’un bâtiment en bois peut donc être améliorée en incorporant des matériaux à haute capacité thermique tels que le béton, les chapes, la terre crue ou des panneaux de plâtre ou d’argile. Un minimum d’inertie est nécessaire pour répondre aux exigences normatives actuelles, il est donc primordial d’intégrer un élément de ce type dans une construction bois.
Différentes configurations de ventilation naturelle :
1. Ventilation à ouverture unique : la profondeur de la zone bien aérée est environ égale à trois fois la hauteur de l'ouverture.
2. Ventilation traversante : idéale pour l'aération de grands locaux, cette configuration fonctionne d'autant mieux que sous l'effet de la brise nocturne, la différence de pression entre chaque façade est accentuée.
3. Ventilation par effet de cheminée : le tirage est favorisé, dans le cas de pluseiurs étages. Cette configuration permet une entrée d'air frais à tous les étages.
Conclusion
Les solutions pour garantir un bon confort d’été dans les constructions en bois sont multiples et complémentaires. L’isolation thermique efficace, l’inertie thermique accrue, la ventilation naturelle, la protection solaire passive, les toitures et façades végétalisées, jouent toutes un rôle essentiel. En combinant ces stratégies, il est possible de créer des habitations en bois qui restent confortables même pendant les périodes de forte chaleur, tout en étant écologiques et économes en énergie.
Pour plus de renseignements:
Cedotec, Office romand de Lignum
021 652 62 22
info(at)cedotec.ch
Article du service technique du Cedotec Office romand de Lignum paru dans l'IDB no 7 de juillet 2024 de la FRECEM. Texte Lucie Mérigeaux.